Ce très beau montage vidéo a été réalisé le 26 juin 2011...
Plus d'un an avant la sortie du film.
Plus de six mois avant la sortie de la première bande-annonce...
Jean-Jacques Bonvin a étudié la sociologie, travaillé pour l'OMS, est parti étudier la danse à New-York avant de voyager 'un peu partout' de 1979 à 1983. Ballast, son dernier livre sorti le 18 août 2011, retrace le parcours de la Beat Generation en se centrant sur le personnage de Neal Cassady.
- Comment vous-êtes vous préparé pour l’écriture de ce livre ?
Pas de préparation. C’est venu d’un coup à la suite de la lecture du livre de Carolyn Cassady, la femme de Neal. C’est elle qui m’a poussé à lire ou relire Kerouac et Ginsberg. Burroughs ne m’avait jamais vraiment quitté.
- Ballast parvient en moins de 60 pages à faire revivre l’esprit de la Beat Generation et des épisodes de la vie quotidienne de Jack Kerouac, Neal Cassady, William Burroughs et Allen Ginsberg. Est-ce un choix littéraire de votre part que cette adéquation forme/fond, entre la brièveté de votre livre et celle de la vie de ces quatre personnes ?
Oui. C’est un choix. L’image qui s’est imposée après quelques pages, celle d’un train sur lequel Kerouac écrit à la machine, ne pouvait être agrandie au-delà. Et puis la vie et l’œuvre des Beats ne sont pas symphoniques pour un sou, elles ont au plus la taille d’un quatuor de jazz, ou d’un groupe rock. Idem pour le tempo. S’il y a une adéquation forme/fond, c’est celle de la brièveté et de la vitesse.
- La métaphore de la ‘tempête de fleur’ mais généralement le champlexical du vent est présent tout au long du livre. Pourquoi ?
Le vent, je ne sais pas, c’est flou pour moi. C’est peut-être l’image d’un mouvement aléatoire et passionné. Quant aux fleurs, ce ne sont pas tant celles qui viendront quelques années plus tard avec les hippies que celles qu’on perçoit d’un bus, d’un train ou d’une voiture, si vite que plus que des points ce sont des lignes qu’on voit.
- Ballast est une référence aux circonstances de la mort de Neal Cassady. Pourquoi ce choix de titre ?
Le ballast était un poids ajouté aux navires de la Hanse qui revenaient à vide au port, histoire de garder un peu d’équilibre, on ne sait jamais, de ne pas couler. C’est devenu le matériau qui conduit et soutient les voies de chemin de fer et sur lequel est tombé Cassady. Il y a aussi le son de ce mot, le bruit qu’il fait, celui précisément d’une locomotive.
- Neal est selon Jack Kerouac un génie littéraire, bien qu’il n’ait jamais étudié. Pourtant, il n’a jamais percé, contrairement aux autres membres du groupe… Avez-vous une explication à cela ?
Neal Cassady a été poussé vingt ans durant à écrire par Kerouac et Ginsberg. Carolyn, Ferlinghetti, Corso, ils étaient nombreux à voir en Cassady un nouveau Proust, un nouveau Faulkner, ils ne reculent devant aucune comparaison. La lecture de The First Third, le seul livre de Cassady, révèle dans sa première partie un écrivain plein de bonne volonté, sans plus. La deuxième partie, découverte une dizaine d’années plus tard, est plus intéressante. Certaines phrases sont d’une longueur et d’une complexité folles. Carolyn dit que Neal avait autant de peine à placer un point au terme d’une ligne qu’à freiner à un feu rouge. Mais les écrits les plus forts de Cassady sont sans doute ses lettres. Là, il éclate. Il ne connaît plus de limites. Kerouac a d’ailleurs utilisé certains passages de ces lettres dans ses livres : tels quels. [N/A : illustration ci-dessous avec la comparaison d'un extrait de lettre de Neal Cassady et d'un passage de Sur la route.]
- Vous êtes né au moment de l’écriture du manuscrit de Sur la route. Quand avez-vous lu ce livre ?
Au début des années 70 et je l’ai vite oublié. Après la lecture du livre de Carolyn Cassady, j’y suis retourné. Et puis, il y a deux ans à peu près, a paru la version originale de On the Road, le rouleau,
chez Penguin. C’est alors que j’ai compris l’importance du bouquin, l’entrelacs démentiel entre la frappe sur la machine à écrire et le texte qui n’en finit pas de rouler et se dérouler, comme un train.